mercredi 1 mai 2013

Ne dites pas à ma mère que je suis politicien, elle me croit pianiste dans un bordel.

J'ai déjà raconté ça.

Dans les moments les plus intenses que j'ai vécu, il y eut celui-ci.

Après une petite présentation au noce d'or de mes parents, mon père me saisit par l'épaule,
me regarde dans les yeux, me dit ces simples mots, "Ouain mon gars, tu fais bin ça ".

Te dire.
Je sais pas si je pourrais.
Te dire.
S'qui s'est passé dans ma tête.
S'qui s'est passé dans mon coeur.
S'qui s'est passé dans mes tripes.
Je veux même pas essayer de le verbaliser.
J'ai besoin de préserver la pureté de ce souvenir, la magie, la félicité,
les couleurs, les sons, l'intégrité du moment, la limpidité.
Ce moment m'habite, m'incarne.
Et me guide.
Je voudrais tellement pas le décevoir, le tromper, tricher sa mémoire.
Je saurai jamais lequel de nous deux était le plus heureux ce soir là.
Il était entouré des siens, de sa compagne d'un demi siècle, ses enfants, petits enfants, ses frères et soeurs,
beaucoup de ses amis.
Ses yeux brillaient, son sourire ne semblait pas vouloir le quiter, il riait beaucoup.
C'est sûr qu'il était heureux.
Heureux de même, t'es incapable de pas partager ce bonheur.
T'es incapable de mentir à ton fils.

Je suis sûr qu'il ne m'a jamais menti, ohhh peut-être sur des trucs comme le Père Noël ou la fée des dents,
pour ne pas briser le charme, pour étirer l'innocence.

Dans une vie, tu en rencontre des tempêtes, des emmerdes, des noeuds.
Tu en croise des pourris(es), des malveillants, des profiteurs, en un mot, des crosseurs.

Comment tu vas dealer avec ça, ça dépend souvent de comment t'as été préparé à la vie.
Quand ces choses là se présentent à moi, je fais face, du mieux que je peux.
Je peux jouer dur si on m'y oblige, j'aime pas, mais je peux.


Devant l'inévitable adversité, on dirait que se tient sur mon épaule, un petit chérubin, qui me chuchotte à l'oreille,,,,,,, oublie pas, ton père doit être fier de toi, comme ce jour là.





Un autre moment que j'oublierai jamais, celui ou tu dois dire, pour la dernière fois, salut p'pa.
Avant de partir pour de bon, pour les dernières semaines de sa vie, son disque dur s'était vidé, la machine a déraillé, les épisodes ont perdu la chronologie.
Un jour j'étais son fils, le lendemain son frère, le lendemain encore, un inconnu.






J'ai passé ces derniers moments avec lui, scrutant son regard, à l'affût de ces rares et courts moments
de presque lucidité.





J'y ai vu l'amour, l'amour de sa femme, l'amour de sa famille, l'amour du travail, de la vie.
J'y cherchais la fierté.
Égoïstement j'espère que ce moment là, il l'a amené avec lui pour toujours, au delà de la vie.
Salut p'pa

Yuan





7 commentaires:

  1. Joli billet... Touchant. Tu es riche d'avoir vécu ce moment avec ton père (et toute la relation et l'attachement qui viennent avec).

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  2. Tu as trouvé le bon mot, c'est effectivement une des richesse qu'il m'a légué.
    Merci.
    Yuan

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  3. Tu as le don de venir nous chercher avec tes paroles.

    je suis tellement d'accord avec "Petite libellule." Quelle richesse que votre amour ton papa et toi !

    Tous les enfants devraient connaître cette sorte de relation, mais surtout d'amour.

    Tu porteras toujours dans ton coeur les regards de tendresse et d'amour que tu as vus dans les yeux de ton père tout au long de sa vie. Gardes-les précieusement. Ils sont irremplaçables.

    Merci d'avoir touché mon coeur et mon âme.

    Marjo

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    1. Moi je suis surtout d'accord avec ceci; "Tous les enfants devraient connaître cette sorte de relation".
      Faisons-z-en donc une quête.
      Rien ne m'attriste plus que ces histoires d'enfants négligés, abusés, mal aimés ou même pire, pas aimés du tout.
      Yuan

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  4. Très beau billet. J'anticipe parfois le moment où cette étape se présentera à moi...comment je vais vivre ça...les craintes, la peur, la douleur, la sérennité, la paix...sa mémoire. Merci, tes mots m'ont apporté le réconfort.

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  5. C'est un peu l'histoire du verre à moitié plein ou à moitié vide.
    Quand tu perd un très, très proche, tu peux te dire "Une partie de moi vient de mourir" ou alors "Il/elle continue à vivre à travers moi".
    Bien sûr, cet état d'esprit vient avec le temps.
    Les étapes du deuil sont inévitables, leur durée varie d'une personne à l'autre, mais selon moi, elles font partie de l'apprentissage de la vie.
    As-tu déjà remarqué que plus les gens avancent en âge, plus ils sont sereins face à leur finalité ?
    Yuan

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  6. Tu as bien raison...

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